19 River Street – Laure Rollier – Service de Presse

Titre : 19 River Street

Auteur : Laure Rollier

Editeur : Le Récamier

Street dreams are made of these

Maddie est une femme qui vit seule. Mais pas par choix : il y a douze ans, sa fille, Joséphine, 4 ans, disparaît en mer lors d’un voyage en famille ; son mari a fini par la quitter pour une autre femme et une autre famille ; son fils aîné ne veut plus vraiment avoir affaire avec elle. Mais ancré à l’idée que Joséphine n’est pas morte, elle s’accroche à la maison familiale dans laquelle elle a installé son cabinet de consultation et où elle loue une des chambres. Son, dernier locataire en date est un écrivain, Gabriel.

Un mot posé sur son pare-brise un matin, qui l’invite à se rendre seule à un rendez-vous le lendemain à 22 heures sous couvert de la vérité sur les évènements qui se sont déroulés sur le « Dernière danse », assurant que Joséphine est vivante, entraîne Maddie et Gabriel dans une quête pour découvrir qui est le mystérieux corbeau et ce qui est arrivé à Joséphine.

Sous la plume de Laure Rollier, il y a une sorte de frénésie qui s’empare de Maddie, une excitation aussi forte que son obsession la faisant s’approcher de la folie sans qu’on sache vraiment, comme Gabriel, ce qui relève du fantasme de la mère abandonnée et de l’instinct maternel. Du coup, notre Gabriel, il est tiraillé entre le fait d’aider Maddie et d’aider Maddie. D’abord l’aider à enquêter sur Joséphine. Ensuite l’aider à vivre tout simplement.

Dans le cadre de cette seconde tâche qu’il accepte de tenter de mener à bien, il contacte l’ancien mari de Maddie puis son fils, qui ont chacun une idée bien tranchée sur l’état psychologique de Maddie.

Si les deux personnages centraux, en dehors du « fantôme » de Joséphine, sont clairement Maddie et Gabriel, il y a deux choses essentielles à noter. D’abord que les personnages « secondaires » ne sont pas pour autant bâclés par Laure Rollier. Ensuite que malgré le fait qu’elle développe l’histoire de Gabriel (pourquoi vient-il se réfugier loin de l’Australie où l’attend sa femme ? Pourquoi justement au 19 River Street ?), la fin est à mon goût trop rapidement traitée : en particulier, les raisons qui ont poussé Gabriel à fuir l’Australie ne sont pas de celles qu’on efface aussi rapidement que ce que fait Laure Rollier.

Dans une certaine mesure, Gabriel est le vrai « héros » du roman même s’il possède sa part d’ombres qui n’en fait pas un être lumineux. Mais c’est lui qui catalyse la résolution de son propre récit mais aussi celui de Maddie. Cette dernière est une victime qui ne peut pas s’en sortir seule. Abandonnée par sa famille (par lassitude de celle-ci), elle n’a pas les ressources pour sortir du cercle vicieux dans lequel son esprit l’enferme. La clef est dans les mains de Gabriel. Il aurait mérité à mon sens quelques pages de plus. Voire un récit à lui…

Mais cette réticence est à peu de chose près la seule que j’aurai sur cette histoire traitée avec une humanité qu’on ne trouve pas chez tous les auteurs, certains ne développant aucune empathie pour leurs personnages contrairement à Laure Rollier. Qu’ils soient d’ailleurs sympathiques ou pas, peu importe, chacun a droit à être traité équitablement par la marionnettiste.

Le récit de Laure Rollier (je n’ai pas lu les précédents mais il y a fort à parier que ce serait pareil) s’inscrit indéniablement dans ce qu’on catalogue comme les romans ou thrillers psychologiques, dans lesquels ce qui importe à l’auteur et attire le lecteur c’est ce qu’il se passe dans la tête des personnages plutôt que leurs actes dans la mesure où ceux-ci ne sont que la résultante de leur psyché : ce qui se passe à l’intérieur se voit à l’extérieur…

Ce roman, sans relever de la littérature « feelgood », laisse tout de même la part belle à un happy ending très hollywoodien, ce n’est peut-être pas innocent dans la mesure où le récit se déroule aux Etats-Unis.

Il n’y a aucune recherche de peinture sociétale, de trame sociale, de description de la société : on se concentre uniquement sur les personnages. Et pour les amateurs de genre, c’est un bon cru.