Étiquettes
amitiés, cité-jardin, Dan Nisand, futur, Hildenbrandt, Ischard, Les Avrils, Les garçons de la cité-jardin, Melvil, passé, violence

Titre : Les Garçons de la cité-jardin
Auteur : Dan Nisand
Editeur : Les Avrils
La violence en héritage
Dans les années 1990, Melvil habite dans la Cité-jardin Hildenbrandt, à Mulhouse. Aymé Ischard, c’est le père, Melvil le petit dernier qui habite encore avec papa alors que les deux grands frères sont partis depuis longtemps. Virgile et Jonas ne sont pas des exemples à suivre : violents, brusques, totalement dénués d’éducation. A l’image de celle que véhicule la famille Ischard, ils sont « irresponsables, asociaux, meneurs et récidivistes ».
Melvil, on le sent, a plutôt l’étoffe du bon garçon qui pourrait s’en sortir mais qui se trouve être prisonnier autant de sa famille que de cette ville utopique que constitue la cité-jardin. Le premier récit, son récit, c’est celui de sa famille. Une famille totalement dysfonctionnelle, malveillante, dans laquelle Melvil tient le rôle de souffre douleur.
Des souffre-douleurs, dans cette cité-jardin populaire, il y en a d’autres. Parmi lesquels Hippolyte, victime d’un AVC avec séquelles et dont tout le monde se moque ouvertement et William, le petit-fils du créateur de la cité-jardin. William d’ailleurs nous offre la seconde trame narrative avec l’histoire de la cité-jardin depuis sa création à nos jours.
Dan Nisand écrit un somptueux roman sur l’adolescence, sur le passage à la vie d’adulte, sur l’hérédité face à l’atavisme, sur la trace de l’inné et la force de l’acquis. Le texte est tour à tour aussi fort et abrupt que les personnages et leurs actes ou aussi tendre que les sentiments qui peuvent parfois les relier entre eux. Il y est question d’amitiés qui n’osent pas dire leurs noms. Il y est question de nostalgie, parfois malsaine quand elle fait référence à un passé qu’il vaudrait mieux étouffer. Il y est question d’espoirs, souvent déçus, de futurs, souvent en forme d’impasses. Il y est question de ce qu’on a été, de ce qu’on est et de ce qu’on pourrait être.
Il y a un passage de Dan Nisand qui dis un peut tout ça, avec en plus le sentiment que la seule option était un retour en arrière, une éternelle répétition des mêmes actes : « A la faveur de l’alcool, leur comportement change. Il y a une heure, ils reniaient leurs anciens personnages, encombrants avatars qu’ils se flattaient d’avoir cessé de traîner comme des boulets, ombres faussées d’eux-mêmes qui leur collaient aux semelles ; ivres à présent, ils se ruent sur ces vieilles défroques pour les réendosser. Ils rivalisent, surenchérissent, mais maladroitement, la bande de sales gosses qu’ils furent et voudraient tout à coup ne jamais avoir cessé d’être. »
Mais on voudrait tout pouvoir citer, sans oublier les expressions alsaciennes qui parlent au strasbourgeois de naissance que je suis. Bref, c’est juste parfait, c’est publié par Les Avrils qui cumulent les très bons textes depuis leur lancement, on en voudrait plus des comme ça !